Si je vous dis Toy Story, Ratatouille, Wall-E, Les Indestructibles ou encore Là-Haut, qu’est-ce que ça vous évoque ? Le studio d’animation Pixar, évidemment !

Créé en 1979 puis rachetée en 1986 par l’ex-patron d’Apple Steve Jobs, la société appartient aujourd’hui à la firme Walt Disney Company. Mais aujourd’hui, nous nous intéresserons moins aux films d’animation de Pixar qu’au système de fonctionnement interne de l’entreprise.

Le McKinsey Quarterly (magazine en ligne traitant du management) a rencontré et interviewé le génial Brad Bird en 2008. Réalisateur de plusieurs longs métrages chez Pixar, il nous livre un peu de ce qui s’y passe en coulisses lors de cet entretien.

Voici donc 8 leçons à retenir sur la façon d’encourager la créativité et de penser hors des sentiers battus (Out the Box !), par un homme plusieurs fois récompensé pour son travail.

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1. Dire non à l’autosatisfaction

Brad Bird explique qu’à son embauche, l’écueil majeur à éviter pour les dirigeants de Pixar était celui de l’autosatisfaction.

Après les grands succès critiques et populaires de leurs films, ils cherchaient quelqu’un qui puisse les amener vers de nouveaux horizons artistiques. Quelqu’un qui les bousculent, qui les fassent sortir de leur zone de confort.

Quelqu’un qui leur fasse dire que le succès ne tient pas seulement dans le talent d’une compagnie mais avant tout dans le renouvellement des idées et la prise de risques.

2. Donner leur chance aux « moutons noirs »

black-sheepLors des réunions préparatoires pour Les Indestructibles, Bird expose sa vision du travail à accomplir sur le film. Celle-ci effraie l’équipe technique qui redoute la complexité de l’ensemble et les coûts que l’ensemble sous-entend.

Il dit alors : « Amenez-moi des moutons noirs. Je veux des artistes qui sont frustrés. Je veux ceux qui ont une autre façon de faire les choses et que personne n’écoute. Donnez-moi tous les gars qui sont probablement jetés à la porte. »

L’annonce a fait des mécontents car la façon de travailler actuelle fonctionnait déjà très bien. Mais en laissant les moutons noirs et l’anticonformisme s’exprimer, 3 fois plus de scènes (plus complexes que le film précédent) ont pu être réalisées, le tout en faisant même des économies par rapport à la façon de faire traditionnelle.

« Tout cela parce que les chefs de Pixar nous ont donné l’autorisation d’expérimenter des idées folles. »

3. Accepter que tout ne soit pas parfait

Être perfectionniste, c’est bien. Mais même si Pixar créé des œuvres de loisir, le studio a aussi des délais à respecter.

Bird explique que certains animateurs étaient des puristes, obsédés par l’idée d’obtenir le meilleur résultat, le plus beau rendu. Mais cela n’était pas forcément compatible avec l’emploi du temps fixé par la production.

Pour parer à cela, Brad Bird dû secouer un peu ses équipes, les menaçant d’utiliser des techniques d’animation peu flatteuses si ces puristes continuaient de ne pas prendre en considération les délais.

Il explique :

Certaines séquences doivent être parfaites, d’autres très bonnes, et d’autres encore ont seulement besoin d’être assez bonnes pour ne pas rompre le charme.

Traduction : trop s’attarder sur une étape du processus créatif peut parfois plus vous desservir que l’inverse. Il faut constamment garder à l’esprit l’objectif final, avoir une vue d’ensemble.

4. Être impliqué, faire les choses avec passion

Ce qui rassemble les personnes créatives c’est d’abord une implication, une volonté de dépasser les problèmes. La passivité n’a jamais aidé quiconque à se surpasser pour dépasser ce que l’on croyait impossible.

Mais, on l’a vu avec le point n°3, tout est une question de mesure. Être passionné est différent d’être obstiné !

5. Avoir le courage de bouleverser l’ordre établi

En tant que directeur créatif, Brad Bird a dû manager ses équipes mais aussi savoir tirer le meilleur de chaque individu. Pour y parvenir, il a dû pousser ses animateurs à remettre en question l’autorité pour exposer leurs opinions (et pas seulement celles qui seraient jugées « acceptables »).

Il explique que lorsque il a dirigé Le Géant de Fer, il a hérité d’une équipe totalement détruite par leur expérience avec le précédent directeur créatif. Il les a alors réuni dans une pièce et leur a dit :

brad-bird-pixarÉcoutez, il s’agit d’une jeune équipe. Individuellement en tant qu’animateurs, nous avons tous différentes forces et faiblesses. Mais si nous pouvons interconnecter toutes nos forces, alors nous sommes ensemble le meilleur animateur au monde.

Alors je veux que vous parliez et que vous leviez vos crayons. Nous allons regarder toutes vos scènes devant tout le monde. Chacun sera humilié et encouragé ensemble. S’il y a une solution, je veux que tout le monde l’entende afin de l’intégrer à sa boîte à outil.

Je vais commencer par dire ce que je pense qui peut améliorer la scène, mais si vous voyez quelque chose de différent, lancez-vous et désapprouvez. Je ne connais pas toutes les réponses.

Au départ, les gens n’osaient pas parler ou s’opposer à ce que disait le boss. Ce n’est qu’après 2 mois de réunions qu’une personne a osé réagir, et que l’équipe a pu finalement progresser.

6. Savoir faire table-rase et tout recommencer

Il faut parfois avoir le courage de tout recommencer pour produire quelque chose de mieux. C’est ce qu’explique Bird à travers cette anecdote :

Quand Pixar m’a demandé de reprendre la réalisation de Ratatouille, le projet était en développement depuis déjà 5 ans. A ce moment, les rats avaient été articulés et ne marchaient que sur deux pattes pour ne pas effrayer les futurs spectateurs.

J’ai pensé que c’était une erreur. Je savais que ré-articuler les rats à cette étape du projet coûterait très cher, mais j’ai dit : « ils doivent marcher avec leurs quatre pattes. Et Rémy, le héros, doit être capable de marcher autant sur 4 pattes que sur 2. Tout le monde fut écœuré car cela signifiait un an de travail qui partait à la poubelle.

L’un des animateurs m’a dit « pourquoi devons-nous faire ça » ?

J’étais prêt à lui répondre « Parce que c’est moi le chef ». Mais je me suis arrêté et j’ai réfléchi, car ces personnes avaient tout de même travaillé deux ans sur le projet.

« Ce film raconte l’histoire d’un rat qui veut entrer dans le monde des humains. Nous devons faire ressortir ce choix à l’écran. Si tous les rats marchent sur 2 pattes, il n’y a aucune différence entre lui et les autres rats. Alors que si nous avons cette séparation entre lui et les autres rats, nous pouvons alors laisser le personnage opérer sa transformation selon son état émotionnel et choisir d’être sur 2 pattes lorsqu’il veut être rat ou sur 4 quand il veut s’apparenter aux humains. Cela permet aux spectateurs d’entrer dans l’esprit du héros simplement en le regardant.

7. Croire en l’impossible et prendre des risques

Cela rejoint le point n°4. Comme le dit Bird, « la première étape pour accomplir l’impossible est de croire que l’impossible peut-être accompli ».

Nos croyances sont à la base de tout ce que nous sommes, de tout ce dont nous nous pensons capables ou non. Et cela s’applique aussi à la créativité, qui demande de la confiance en soi mais aussi une bonne part d’audace.

Lors de la préparation du film Les Indestructibles, une personne de l’équipe a demandé si le film n’était pas « trop ambitieux. » Brad Bird répondit alors :

Non ! S’il y a bien un studio qui a besoin de faire des choses trop ambitieuses, c’est celui-là. Vous n’avez rencontré que des succès jusqu’ici. Qu’est-ce que vous en retenez ? Vous ne jouez pas la sécurité – vous faites quelque chose qui vous effraie, qui est à la limite de vos capacités, où vous pourriez échouer. C’est ce qui vous fait vous lever le matin.

8. Travailler dans une atmosphère inspirante

Pour stimuler la culture créative et l’inspiration, Pixar laisse carte blanche à ses employés quant à leur environnement de travail. Brad Bird explique qu’en se promenant dans les studios, on pourra tomber sur un bureau décoré comme une ville de western, un paysage exotique, etc.

John Lasseter, directeur artistique chez Pixar, pense qu’avoir une atmosphère de travail libre, pas trop formelle, peut aider à la créativité.

Il poursuit en parlant des locaux même de Pixar, conçus afin que les employés de différentes spécialités (designers, dessinateurs, animateurs, programmeurs…)  puissent se rencontrer et échanger. C’est dans ce but que Steve Jobs, qui a imaginé le bâtiment, a placé les boites aux lettres, les salles de réunions, la cafétéria et même les toilettes en son centre.

Il avait compris que lorsque les gens se croisent, échangent un regard, des choses se produisent. C’est pour cela qu’il a fait en sorte qu’il soit impossible de ne pas croiser une seule personne de l’entreprise.

Conclusion

Lors de cette interview, Brad Bird a donné de précieux enseignement sur la façon de bâtir une culture de la créativité en entreprise.

En fin d’interview il précise même ce qui, au contraire, mine l’innovation : les individus passifs/agressifs et les auto-satisfaits (cf point n°1), ceux ayant perdu toute humilité vis à vis de leur travail.

L’essentiel, pour lui, est d’abord de garder la passion pour ce que l’on fait et la volonté de toujours avancer.

Pour les personnes à l’aise avec l’anglais, je vous propose de télécharger l’interview originale. Allez-y, ça vaut vraiment le coup !

En attendant, n’hésitez pas à réagir sur cette interview en commentaires !

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